S’ouvrir aux jeunes tropicalistes et leur offrir un espace commun, soutenir de façon pro-active la démarche One Health, prioriser l’amélioration de l’accès aux soins, telle est la volonté affirmée de la SFMTSI au terme de son séminaire de réflexion d’octobre dernier.

Préciser le cap de la SFMTSI et définir les outils à créer, à renforcer et à mettre en œuvre pour le conserver furent l’objet d’une réflexion menée par les responsables de la SFMTSI le 20 octobre dernier. En effet, les missions de la SFMTSI ne rendent pas totalement compte de ce qu’est effectivement la médecine tropicale aujourd’hui.

De l’appréhension de la complexité de la notion de médecine tropicale, de sa compréhension et de sa définition dépend à l’évidence les objectifs que peut se fixer la Société.

Celle-ci intègre l’infectiologie (principalement les maladies de la pauvreté et les maladies tropicales négligées), la médecine des voyages, les pathologies de l’immigration, tout autant que la lutte contre nombre de pathologies émergentes ou encore les aspects tropicaux de beaucoup de maladies non transmissibles survenant le plus souvent dans un contexte de pauvreté.

Dans sa composante géographique et géopolitique, elle doit sans cesse adapter sa pratique scientifique aux particularités environnementales, économiques et sécuritaires. On ne prend pas en charge un patient atteint d’une affection donnée, même bien connue, de la même façon dans une région en guerre, dans un camp de réfugié, dans la brousse, en périphérie d’une mégapole mal urbanisée, dans un contexte de dénuement extrême ou encore en banlieue parisienne.

La notion de médecine tropicale prend aujourd’hui tout son sens dans le contexte d’une très ancienne notion déjà évoquée par Hippocrate, mettant en évidence l’interconnexion de la santé des humains et des animaux, de la sécurité alimentaire, de l’environnement, de l’économie, de l’anthropologie et de bien d’autres déterminants. Cette interconnexion, après avoir porté bien des dénominations est maintenant fixée dans le concept de One Health, lui-même fondateur du concept de santé internationale…

A ceci s’ajoute la notion de durabilité, consubstantielle de celle d’élimination des maladies ou de qualité des systèmes de santé pointant la nécessité de parvenir à un niveau de soins et de santé, voire de bien être, que chacun souhaitera préserver… La durabilité est intimement liée aux problématiques de développement.

C’est cette conscience de l’identité multifactorielle de la « médecine tropicale » qui a conduit la SFMTSI à confirmer son inscription dans la santé internationale et à confirmer son rôle dans la facilitation de la résolution des nombreuses lacunes évoquées plus haut.

Il apparaît ainsi que la « Santé tropicale » est faite de deux piliers : un pilier médical et scientifique, la « médecine tropicale » et un pilier politique, la « santé publique tropicale ». Cette double responsabilité a pour espoir de réconcilier la pratique individuelle (médecin-malade) et la pratique publique (politiques de santé) indissociables dès lors que son exercice intervient dans un contexte de pénurie.

La SFMTSI réaffirme donc sa volonté :

  • De s’ouvrir à un large panel de scientifiques et professionnels de santé humaine et animale de toutes catégories, et à un large champ de spécialistes ou praticiens des sciences sociales, économiques, techniques en lien avec les déterminants exposés ci-dessus.
  • De faire une priorité de la résolution des problèmes d’accès aux soins, incluant l’accès aux structures de santé, l’accès au diagnostic, l’accès aux médicaments et l’accès au traitement. Peut-on imaginer un exercice médical sans structure de santé ? Comment définir un malade sans diagnostic ? Comment traiter un malade sans médicament ? Comment traiter un patient sans structure de soins ? Les réponses à ces questions sont d’une importance capitale et d’une grande complexité. Mais la réalité est là et les réponses sont largement insuffisantes. La résolution des larges faiblesses de l’accès est désormais considérée comme une priorité par la SFMTSI.
  • On peut ajouter à la liste des accès défaillants, la réduction dramatique des effectifs de scientifiques, spécialistes et professionnels de santé de première ligne dans le domaine de la santé tropicale. Ce problème doit faire l’objet d’une attention renforcée car il pourrait rapidement conduire à un désastre dans beaucoup de régions. Les jeunes professionnels sont trop souvent isolés et leur mise en réseau ne peut être que bénéfique, afin d’exploiter au mieux toutes les compétences existantes ou potentielles. Les savoirs doivent être sauvegardés à tous les niveaux et doivent être développés. Il est nécessaire d’encourager et motiver ceux qui pourraient hésiter à se consacrer à la santé tropicale et de les dissuader de se diriger vers des spécialités plus lucratives et supposément plus glorieuses ! Il est aussi nécessaire de leur offrir un lieu d’échanges et de collaborations, libre de contraintes politiques ou financières.

Afin de renforcer ces axes la SFMTSI va mettre en place :

  • Un « Cercle des Jeunes Tropicalistes Francophones » destiné à fédérer les jeunes de moins de 40 ans, étudiants ou actifs des métiers de la santé et du social, arguant d’un intérêt pour la médecine tropicale et santé internationale. Il s’attachera à promouvoir la formation et la recherche ainsi que la collaboration internationale en médecine tropicale et santé internationale. Au-delà des activités d’animation de ce réseau, de veille bibliographique, de participation à la revue MTSI, aide à la recherche, le « Cercle » sera en charge de la gestion et du suivi du :
  • « Fonds pour la mobilité Nord-Sud et Sud-Nord de la SFMTSI ». Ce fonds nouvellement créé, doté de 15.000 euros par an sera destiné à aider à la réalisation de projets de mobilité déjà mis en place par de jeunes professionnels de santé de moins de 40 ans, mais recherchant un appui financier complémentaire afin de compléter le budget de leur projet. Chaque contribution acceptée par la SFMTSI fera l’objet d’un versement unique et fera l’objet d’un suivi par le « Cercle des Jeunes Tropicalistes Francophones ».

La SFMTSI espère ainsi contribuer à l’établissement des politiques de développement en matière de santé, adaptant ses racines fondatrices au monde actuel et retrouvant son rôle expert en la matière.

Appartenir à la SFMTSI, c’est partager cette vision de la médecine tropicale et de la santé internationale et apporter un support sans faille à tous ceux qui contribuent à l’allègement du fardeau des maladies tropicales et de la pauvreté.

Jean Jannin, SFMTSI